Le Deal du moment : -28%
Précommande : Smartphone Google Pixel 8a 5G ...
Voir le deal
389 €

Aller en bas
Ludwig von Offenberg
Ludwig von Offenberg
Enfant de la Nuit
Messages : 24
Date d'inscription : 28/04/2021

(Abraham) ▼ Sun Kissed Empty (Abraham) ▼ Sun Kissed

Jeu 25 Avr - 16:44
Sun Kissed
Abraham&Ludwig
Nothing gold can stay
Like love or lemonade
Or sun or summer days
It's all a game to me anyway
Hush

Au sein des ténèbres artificiels, je les sens, ces doigts, mains inquisitrices, conquérantes qui osent se perdre à la surface de mon être, effleurer mon derme glacé pour y déposer accusations et châtiments qui d'ordinaire, préfèrent être murmures courroucés, hurlements passionnés que l'on vomit au visage de l'univers et de ses bourreaux mais qui, en cette nuit, sont autant d'intrus, spectres et autres démons nés de l'imaginaire d'hommes terrifiés à l'idée de n'être que de la chair vouée à être décomposée, qui se frayent contre les courbes de mon être ce chemin jusqu'à ma gorge exposée, à mes lèvres rapidement effleurées par celle d'une magie ancienne, par un art occulte dont le parfum âcre suffit à me faire plisser le nez, à me pousser à entrouvrir les yeux, pour enfin, découvrir dans le rien, cette simple émanation abstraite qui me domine, se fait presque amante me chevauchant, se permettant de détailler de ses paumes intangibles, de ses yeux absents, les monts et creux de mon torse, à la recherche de ce cœur dénué de pouls, de cet organe qui en ma cage thoracique, n'est désormais plus qu'un amas de cellules inutile, une masse de tissus et de veines au sein duquel, stagne probablement, les échos d'une vie dont il ne reste aujourd'hui rien de plus que des souvenirs, d'immortels tics conservés par cette carne incapable d'oublier ce que la psyché aime pourtant oblitérer. D'un battements de cils, je tente, en vain, de chasser l'apparition aux formes changeants, à la présence instable, allant jusqu'à entrouvrir les lèvres pour mieux dévoiler mes crocs, récolter ainsi sur ma langue, la saveur de cette magie qui fait de l'air, de l'éther, une mélasse rendant plus difficile encore ces rares gestes que je parviens à esquisser, mes tentatives d'échapper à la torpeur, à l'étreinte d'un sommeil imposé par le soleil , une poix qui parvient à s'enfiler dans mes veines, à embourber mes nerfs, anesthésiant mes sens pour me rendre docile, me faire douce victime de cette chose qui danse au-dessus de moi, qui de ses doigts devenus myriade, infinité, vient déposer sur ma gorge, quelques caresses qui rapidement, deviennent incandescentes morsures, brûlantes tortures, odieuses souillures, affreuses attentions pour lesquelles je pousse un hurlement, un feulement déchirant qui n'a rien d'humain, au grand plaisir de cette chimère immatérielle dont le sourire désormais apparent ne dévoile qu'un abîme de dents, de langues, de voix unies pour mieux se démêler et créer dans le silence de ma chambre jusqu'ici inviolée, les plaintes déchirantes des damnés et autres miséricordieux prisonniers de la gueule même des enfers, de ces âmes inlassablement broyées par les mâchoires de la cruauté étrangement juste et équitable d'un purgatoire indifférent aux pleurs et autres regrets des infortunés.

Embrassé par le soleil, te voilà prêt à être jugé.
Les adorateurs viendront pour récolter le fruit de leur labeur.
Ils viendront pour de tes veines, extraire ce poison qui sera la panacée de tes frères.
Au zénith qui chassera la nouvelle lune, tout sera pardonné pour ceux prêts à te renier.


En mes chairs, je sens alors une chaude sensation s'infiltrer dans mes veines, se faufiler en mes artères jusqu'à atteindre ce myocarde qui, pour la première fois depuis des siècles, se contracte.



Sous la pulpe de mes doigts, je sens encore les creux et monts des caractères imprimés il y a des années de cela,  la texture grasse de cette encre qui n'a encore perdue son odeur, qui malgré la poussière et la détérioration naturelle du papier, continue d'exhaler cette douce fragrance qui séduit mes sens, flatte mon palais, le bout de ma langue saturé des odeurs qui embaument la pièce, cette demeure au sein de laquelle, je suis intrus, impromptu invité que l'on ne cherche pourtant plus à chasser, à qui l'on accorde le droit d'errer face à ces immenses bibliothèques sur les étagères desquelles résident ouvrages et autres carnets que je feuillette par besoin de leur arracher quelques secrets, dans l'espoir, peut-être de saisir, capturer quelques fragments de leur propriétaire, de l'héritier, l'enfant de cet homme qui pensait un jour être capable de vaincre Dracula, qui un temps, fut assez fou pour croire à mes mensonges, assez naïf pour avoir cru trouver dans mon regard, l'envie de me racheter, cette culpabilité qui pousse les condamnés à se repentir, à tenter d'effacer de leurs regrets et autres prières,  les travers de leur âme viciée, les tares si humaines contre lesquelles ils ne peuvent rien, si ce n'est les embrasser, les détester, en faire autant de démons avec lesquels danser. Enveloppé d'un silence que j'accueille avec plaisir, aimant me fondre dans son étreinte intangible, presque imperceptible, c'est planté au milieu de la pièce que je parcours les pages fragiles, jaunies, d'un ouvrage à la couverture rongée par les siècles, par le passage incessants de mains curieuses et fébriles, par les soupirs fiévreux, les murmures impatients d'érudits qui n'ont probablement extrait de la reliure fatiguée que les fragments de cette vérité qui se refuse à moi, se cache, se terre sous des traductions erronées, des énigmes semées au milieu de paragraphes qui n'ont jamais été achevés, de sigles et autres glyphes au sens depuis longtemps égarés, emporté par les derniers membres d'un Coven dont il ne reste aujourd'hui, qu'une illustration à moitié effacée par l'humidité, par ces quelques gouttes de sang depuis longtemps avalées par le papier.

C'est bien ce que je déteste le plus, en réalité, chez les tiens, Abraham. Cette incapacité à conserver ce qui est important, à trop souvent croire que la connaissance sera faite éternité, qu'il y aura toujours quelqu'un après vous pour l'archiver, pour prendre la peine de la sauver de l'oubli. Combien de choses avons-nous perdu au nom de cette médiocrité crasse qu'il est impossible d'exciser de votre chair ? Avez-vous seulement conscience qu'à chaque ouvrage délaissé, égaré, brûlé, vous vous perdez un peu plus, vous oubliez au point qu'un jour, vous ne saurez même plus vous souvenir qu'un jour, vous avez pu vous qualifier d'êtres pensants, d'hommes évolués.

Je frissonne, cille à peine en entendant à quelques mètres de là, craquer une des planches du couloir menant au salon, me raidissant pour la forme quand dans mon dos, j'entends la porte s'entrouvrir, charriant avec elle, le parfum si reconnaissable du médecin, cette chaleur qui vient sur mon échine, se faire souffle brûlant pour lequel, j'inspire pour me délecter des arômes de sa colère, de cette rage qui attise ma faim, réveille en moi cette bête faite d'instincts, de pulsions et autres désirs égoïste dont les griffes labourent mon estomac, déchirent et délitent mes organes pour en mes os évidés de toute moelle, distiller l'essence même d'un plaisir fait ultime ivresse, démence qui aurait raison de tout être à la chair trop faible.

« Tu es en retard. » finis-je par souffler sans lever le nez de la gravure dépeignant un rituel païen, où autour d'un brasier immense, danse aveugles et infirmes à la peau ravagée par le feu, les mains tendues vers les cieux alors qu'à leurs pieds, gisent cadavres et carcasses de chouettes et autres chauve-souris dont les yeux arrachés servent désormais de talismans que les fidèles en transe embrassent, lèchent, avalent, dévorent, le visage déformé par une forme démence si monstrueuse qu'elle en devient grotesque. « Tu as pris trois minutes de plus pour arriver à la maison. Soit un patient s'est montré difficile avec toi, soit tu as dû répondre aux questions d'un étudiant angoissé. » Je marque une pause pour finalement, lui faire face. « Je peine à savoir laquelle est-ce,  la crainte et la colère te font suffisamment transpirer pour que je sois incapable de faire la différence. »

Presque nonchalamment, je fais un pas vers lui, impassible, confiant, un peu trop sûrement, dans l'espoir de faire preuve de ma bonne foi, dévoilant ainsi l'absence de mon sabre à ma ceinture, le caractère décontracté d'un costume au col négligemment ouvert afin de dévoiler cette étrange marque incandescente qui illumine ma gorge, dont le tracé étrangement régulier évoque la forme d'un soleil à son zénith dont les rayons sont autant de poignards colonisant mon derme, suivant le parcours de ma carotide pour mieux feindre de venir transpercer ma mâchoire, de sous ma mâchoire, se frayer un chemin jusqu'à mes pupilles étrangement dilatées.

« Je t'ai attendu. » ose-je lui reprocher, livre en main la tête légèrement relevée sans même le réaliser avant de m'excuser d'un léger sourire. « J'étais impatient de te voir, pour être honnête. »

Assez pour appréhender cet instant, pour me faire celui quand j'ai rencontré ton père, quand il m'a fallut faire le deuil de cette amitié que nous aurions pu entretenir, si je n'avais pas été si fidèle à mon frère. Parfois je le regrette, tu sais. D'avoir été loyal, d'avoir humilié cet homme qui aurait dû triompher.

« J'ai besoin de toi, Abraham. » Sans lui laisser le temps de combler le silence, je reprends d'une voix douce, d'un ton trahissant à quel point je déteste me faire si faible face à lui. « J'ai épuisé toutes mes options et tu es le seul vers qui je peux me tourner. Le seul qui peut encore, peut-être, m'aider. » Incapable de retenir cette fois-ci un bien amer sourire, c'est après une expiration amusée que je poursuis. « Je réalise le ridicule de la situation, mais vois-tu je viens à toi comme patient, malade que ton serment d’Hippocrate t'interdit de laisser mourir, comme un souffrant qui mérite ton impartialité, qui malgré ses crimes, se doit d'être soigné. »

Je pourrais m'en vouloir d'ainsi me jouer de ton humanité, de cette bonté que je sais qualité qui finira un jour par t'emporter, mais j'espère que tu peux comprendre qu'à ma place, tu ferais pareil, sauf que toi, peut-être, tu t'en voudrais.

« Je perds mes sens. Lentement, progressivement, je les sens se détériorer. »
Les crocs serrés, le regard désormais fuyant, je peine à souffler ce terrible aveu. « Je n'aurais plus de goût à l'aube. Je perdrais le toucher dans deux jours, la vue suivra le lendemain. Le reste m'échappera dans le courant de la semaine. »

Au moment de la nouvelle lune, très exactement.

« Il me faut les retrouver. » conclus-je en lui tendant le livre ouvert sur la page dépeignant le rituel fait à un dieu désigné par la légende comme le Dieu Solaire, Ultio le dernier à régner.

Avant lui, il y avait tout.
Après lui, il n'y aura plus un homme pour le vénérer




Made by Neon Demon
Revenir en haut
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum